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25 mars 2017 6 25 /03 /mars /2017 20:29
Les approximations et les intox de François Fillon à « L’Émission politique »

Le candidat Les Républicains était l’invité de France 2, jeudi. Il a émis plusieurs assertions inexactes, voire erronées. Retour sur les principales.

LE MONDE | 24.03.2017 à 01h06 • Mis à jour le 24.03.2017 à 10h34 | Par Samuel Laurent, Gary Dagorn et Eléa Pommiers

François Fillon était l’invité de « L’Emission politique », sur France 2, jeudi 23 mars. Le candidat Les Républicains (LR) est revenu sur les soupçons d’emploi fictif de son épouse, qui sont à l’origine de sa mise en examen, et il a également évoqué son programme, au prix d’approximations, voire de contre-vérités.

 

    • Affaires et patrimoine

Ce qu’il a dit :

« L’enquête a été ouverte avec une rapidité, du jamais-vu dans l’histoire de la VRépublique. »

PLUTÔT FAUX

Parmi les éléments cités par M. Fillon pour justifier l’idée d’une instrumentalisation de la justice contre lui, il évoque le fait que l’enquête du parquet national financier aurait été ouverte dans un délai record.

L’information judiciaire a été ouverte le 24 février, un mois après les révélations du Canard enchaîné, et au terme d’une enquête préliminaire, ouverte, elle, le lendemain des révélations de l’hebdomadaire. La mise en examen a eu lieu le 14 mars, soit dix-huit jours plus tard.

Ce délai n’est pas exceptionnel : dans l’affaire Cahuzac, l’enquête préliminaire avait été déclenchée le 7 décembre 2012, soit trois jours après les premières révélations de Mediapart. Le 19 mars 2013, le parquet ouvrait une information judiciaire et M. Cahuzac était mis en examen le 2 avril, soit, donc, quatorze jours plus tard. Quatre de moins que dans le cas de M. Fillon.

On peut également rappeler que le candidat des Républicains avait lui-même demandé que la justice aille vite dans ce dossier. Il est par ailleurs difficile de faire des comparaisons sur des décennies : le parquet national financier, qui instruit ce type d’affaires, n’a été créé qu’en décembre 2013.

Ce qu’il a dit :

« Mon patrimoine est légèrement moins important que celui de Jean-Luc Mélenchon. »

C’EST PLUS COMPLIQUÉ

Si on retire les passifs (dettes) pour avoir un patrimoine net, on obtient une différence mince entre les deux candidats : 1 016 646 euros pour M. Fillon, et 965 488 euros pour M. Mélenchon. Ce dernier a donc un patrimoine légèrement moins important que le candidat de droite, et non l’inverse.

Même chose si l’on prend les deux déclarations publiées par la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, et qu’on compte uniquement l’actif patrimonial. On parvient alors à un patrimoine de 1 131 925 euros pour l’ex-premier ministre. Le chef de file de La France insoumise, lui, dispose de 1 131 210 euros d’actifs, très légèrement moins, donc.

Si en revanche on compte les emprunts comme faisant partie du patrimoine propre d’un individu, comme a pu le considérer François Fillon, le patrimoine de Jean-Luc Mélenchon est légèrement supérieur au sien (1 296 000 euros, contre 1 247 000 euros).

L’accusation de Fillon sur Hollande démentie par l’un des coauteurs du livre

Interrogé sur les affaires qui le cernent, François Fillon a répliqué en accusant le président de la République d’être responsable de l’information judiciaire ouverte par le parquet national financier le 24 février.

« C’est un livre qui (…) explique que François Hollande fait remonter toutes les écoutes judiciaires qui l’intéressent à son bureau, ce qui est d’une illégalité totale. Un livre qui explique comment François Hollande est branché en permanence sur Tracfin, comment il est au courant des moindres faits et filatures. On cherchait un cabinet noir, on l’a trouvé. »

Le candidat des Républicains a déclaré fonder ses accusations sur un livre écrit par les journalistes Olivia Recasens, Didier Hassoux et Christophe Labbé – qui travaillent tous deux au Canard enchaîné –, Bienvenue Place Beauvau, Police : les secrets inavouables d’un quinquennat.

Rapidement, la contre-attaque de M. Fillon se heurte à une série de démentis : celui de l’Elysée, tout d’abord, mais surtout celui des auteurs eux-mêmes. Contacté par Franceinfo, Didier Hassoux a déclaré : « On n’a jamais écrit ça », citant le passage dudit livre consacré au « cabinet noir », page 24 :

« Le retour aux affaires des chiraquiens nourrit bien évidemment le soupçon sarkozyste de l’existence d’un cabinet noir. Il n’est pas possible d’en apporter la preuve formelle, comme il n’est pas possible de prouver le contraire. »
    • Immigration et nationalité

Ce qu’il a dit :

« D’abord nous n’avons jamais, en 2007, proposé une politique de limitation de l’immigration par quotas. »

Douteux

Interpellé par Steeve Briois, maire Front national (FN) d’Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais), sur sa politique en matière d’immigration, François Fillon a affirmé que Nicolas Sarkozy n’avait jamais proposé une telle politique.

C’est quelque peu jouer sur les mots : l’ancien président de la République avait évité de prononcer le terme de « quotas » durant sa campagne, préférant parler d’« immigration choisie » ou de « plafonds annuels ».

Dès septembre 2007, quatre mois après son élection, M. Sarkozy déclarait qu’il souhaitait arriver à « établir chaque année, après un débat au Parlement, un quota avec un chiffre plafond d’étrangers que nous accueillerons sur notre territoire » ; soit la même proposition que M. Fillon. Brice Hortefeux, nommé ministre de l’intérieur en 2007, était chargé de réunir une commission d’experts présidée par Pierre Mazeaud pour réfléchir à l’application de cette mesure. Celle-ci avait conclu que les quotas seraient difficiles à mettre en œuvre.

    • Baisses de cotisations et pouvoir d’achat

Ce qu’il a dit :

« Je propose 40 milliards d’euros de baisse de charges et de fiscalité sur les entreprises et l’investissement et en même temps un effort sur le pouvoir d’achat. A mon sens, les autres candidats, ceux qui ont chance d’accéder à la présidence, ne proposent pas de telles mesures. »

C’EST FAUX

François Fillon, seul candidat à proposer cela ? Pas vraiment. L’idée de coupler une baisse importante des cotisations sociales sur les entreprises et une action sur le pouvoir d’achat est également au cœur du programme d’Emmanuel Macron et, dans une moindre mesure, de Marine Le Pen.

Ainsi, la candidate du FN veut transformer le crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE) de François Hollande en baisses de cotisations sociales et réduire les prélèvements (impôts et cotisations sociales) pour les TPE-PME. Pour le pouvoir d’achat, elle propose, comme François Fillon, de rehausser le plafond du quotient familial, de rétablir l’universalité des allocations familiales et d’augmenter les petites retraites.

Emmanuel Macron rejoint François Fillon pour dire que la fiscalité ne doit pas pénaliser les entreprises et l’investissement. C’est pourquoi il souhaite, comme son concurrent LR, réduire les cotisations patronales et l’impôt sur les sociétés.

Pour les ménages, le candidat d’En marche ! a, là aussi, des mesures similaires à celles de l’ancien premier ministre : réduire les cotisations salariales pour augmenter le pouvoir d’achat notamment. M. Macron prévoit 100 milliards d’euros sur le quinquennat pour financer ces baisses ; M. Fillon en prévoit 50.


En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2017/03/24/les-approximations-et-les-intox-de-francois-fillon_5099890_4355770.html#3Ur36oUkxjOub9Vy.99

Les approximations et les intox de François Fillon à « L’Émission politique »
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