et dans le monde.
À l’annonce de l’élection de Nicolas Maduro, les premières réactions des principaux leaders des pays du sous-continent expriment un ouf ! de soulagement. Car en défendant sa révolution dans les urnes, le peuple vénézuélien se voyait, dans les faits, investi de la responsabilité de consolider les changements qui ont transformé l’Amérique latine au tournant du XXIe siècle.
On a du mal aujourd’hui à se représenter le paysage géopolitique lorsque Hugo Chavez accéda pour la première fois au pouvoir, en 1998. La soumission aux États-Unis, l’autoritarisme politique et l’ultralibéralisme régnaient en maîtres. Le monde garde de cette époque, qui paraît bien lointaine, le souvenir des Argentins réduits à la misère contraints d’assaillir les supermarchés. Si le processus d’émancipation de l’ancienne « arrière-cour » des États-Unis a pris dans chaque État des formes particulières résultant des histoires nationales souvent tragiques, le chemin emprunté par le pays de Bolivar eut indiscutablement un rôle d’entraînement, d’impulsion, enclencha une dynamique, commença à modifier les rapports de forces.
Avec Chavez, le peuple du Venezuela a donné une forme concrète au mot d’ordre « Un autre monde est possible », lancé, à partir de 2001, par le premier Forum social mondial, non loin de là, à Porto Alegre (Brésil). Les dirigeants vénézuéliens ont en effet apporté la preuve qu’un gouvernement est capable de faire prévaloir la souveraineté populaire sur la loi du marché. Ayant à la fois du pétrole et des idées, ils ont préféré utiliser une partie des revenus de l’or noir pour faire reculer de 50 % la pauvreté, lutter contre la malnutrition, en finir avec l’analphabétisme, investir dans la santé et la culture plutôt que de distribuer des rentes aux actionnaires et se soumettre aux compagnies internationales. Le Venezuela est devenu le pays le moins inégalitaire de la région, selon l’ONU. Cela ne plaît pas à tout le monde, notamment à la caste des riches à laquelle appartient le chef de la droite, Henrique Capriles.
La disparition d’Hugo Chavez, quelques mois après sa réélection avec 56 % des voix, fut évidemment un élément de fragilisation du gouvernement face à une opposition qui n’a eu de cesse, depuis quinze ans, de mener une lutte acharnée au service des oligarchies financières. Le président défunt ne fut-il pas victime d’un putsch en 2002, avant d’être ramené au pouvoir par la mobilisation populaire ? Celui qu’une partie de la presse internationale n’hésita pas à traiter de dictateur ou de caudillo fut visé, en vain, en 2004, par un référendum révocatoire, prévu par la Constitution, à la demande de la droite.
La courte victoire de Nicolas Maduro sur le candidat du rassemblement de la droite vient rappeler que l’affrontement reste extrêmement vif sur le choix de société. Succédant à Hugo Chavez, personnage charismatique qui occupait l’essentiel de l’espace politique, Maduro devra prendre pleinement possession de sa fonction de président. La droite demeure très forte et dispose de grands moyens logistiques – au plan financier et médiatique – et elle a montré dans le passé qu’elle pouvait transgresser les règles de la démocratie.