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19 septembre 2015 6 19 /09 /septembre /2015 22:16
Photo : Charles Platiau/Reuters

Photo : Charles Platiau/Reuters

Samedi, 19 Septembre, 2015 - Humanite.fr

 

Après sa charge contre les 35 heures fin août le Ministre de l'Économie Emmanuel Macron a déclaré vendredi à propos du statut de fonctionnaire qu'il n'était « plus adéquat » et « plus justifiable compte tenu des missions ». François Hollande est rapidement intervenu pour tenter d'éteindre le feu.

C'était lors d'un débat public organisé par le think tank « En temps réel ».  « On va progressivement entrer dans une zone - on y est déjà d'ailleurs - où la justification d'avoir un emploi à vie garanti sur des missions qui ne le justifient plus sera de moins en moins défendable », a lancé le Ministre de l’Économie, lui-même haut fonctionnaire. Et il poursuit : le statut des fonctionnaires n'est « plus adapté au monde tel qu'il va » et, « surtout, n'est plus justifiable compte tenu des missions ».
Les déclarations de Macron contre le statut de fonctionnaire ont d'abord été diffusée par Challenge. L'hebdomadaire indiquait sur son site internet que le Ministre avait considéré que ce statut n'était « plus adéquat ». 
Défendant son idée d'une société divisée entre « insiders et outsiders », des gens très protégés et d'autres sans aucune protection, Emmanuel Macron a affirmé: « Je ne sais pas justifier que quelqu'un qui travaille dans la cybersécurité dans une PME soit un contractuel en CDD et que quelqu'un qui travaille, par exemple, dans mon ministère dans le développement économique doit être un fonctionnaire. »  « Il n'y a plus de justification fonctionnelle à ça ». Interrogé pendant le débat sur la réforme de l'État, le Ministre a, selon Les Échos, estimé que la gauche devait ouvrir le débat sur la fonction publique. « Nous devons mener cette réflexion car elle est un levier de changement », a-t-il dit.  Selon Les Échos, le Ministre a aussi jugé qu'il fallait mener ce débat non « pas en stigmatisant celles et ceux qui travaillent dans le service public, mais en mettant les choses de manière moderne et en construisant notre propre pensée ». « Sinon, la première chose qu'on nous dira, c'est que ce sont des idées de la droite. Je ne crois pas, non ».

 

Éteindre le feu

Si c'est Valls qui avait du réagir rapidement pour rassurer les Français attachés dans leur grande majorité aux 35 heures, c'est aujourd'hui François Hollande qui désavoué son jeune Ministre: « Être fonctionnaire, ce n'est pas être dans une position figée, ce n'est pas refuser la modernité, être fonctionnaire, c'est, au contraire, être toujours capable d'anticiper, de prévoir et de servir ».
« Et c'est la raison pour laquelle le fonctionnaire a des droits, le statut, et a des devoirs et qu'il doit en permanence s'adapter, évoluer et être capable d'être au meilleur pour être au service du public. »
Le Ministre a du se fendre d'un correctif auprès de l'AFP : « A aucun moment je n'ai parlé d'une réforme du statut de la fonction publique que le gouvernement envisagerait ». Ce « statut n'est pas remis en cause », a déclaré Macron en se défendant de l'habituel: « Les propos partiels rapportés donnent une vision déformée de ma pensée ».

 

Macron récidive: le statut de fonctionnaire n'est « plus adéquat » ni « justifiable » !
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31 août 2015 1 31 /08 /août /2015 22:45

L'éditorial de Patrick Apel-Muller !

Le tango rétro d’un duo  !

Difficile de prétendre incarner l’avenir quand la jeunesse trouve votre projet réactionnaire ! L’acrobatie se complique quand il faut prendre ses distances avec un membre du gouvernement qui dit mot pour mot ce que vous disiez lors des primaires socialistes en 2011…

Le tango rétro d’un duo  !

La mutinerie couve sur le pont de l’Hermione. Après qu’il eut posé à la barre de la frégate et filé la métaphore du commandant sûr de son cap,

Manuel Valls s’est trouvé aux prises avec une mutinerie, samedi soir, lors du dîner de l’université d’été du PS. Sifflé, hué, le premier ministre s’est confronté à des jeunes socialistes qui réclamaient la démission d’Emmanuel Macron, sur l’air des lampions. Difficile de prétendre incarner l’avenir quand la jeunesse trouve votre projet réactionnaire ! L’acrobatie se complique quand il faut prendre ses distances avec un membre du gouvernement qui dit mot pour mot ce que vous disiez lors des primaires socialistes en 2011…

« On appelle duo, écrivait Jean-Jacques Rousseau, une musique à deux voix, quoi qu’il y ait une troisième partie pour la basse continue, et d’autres pour la symphonie. » Nous accorderons la basse à François Hollande, qui a décidé de remplacer le socialisme français par le social-libéralisme ; quant à la symphonie, c’est le Medef qui la produit. Et, au sortir de leurs assises, les grands patrons ont de quoi se réjouir, Manuel Valls a entonné leur air préféré : « Revoir en profondeur la manière même de concevoir notre réglementation » du droit du travail pour donner « plus de latitude aux employeurs », « plus de souplesse aux entreprises ». Le pistolet sur la tempe, les salariés auraient le droit, en guise de compensation, de donner leur accord… Dans ce tango, c’est toujours la marche arrière qui domine.

Dans ce contexte, les plaidoyers pour l’union des gauches au premier tour ou la « belle alliance » prônée par Jean-Chistophe Cambadélis sonnent faux. Le ralliement affamé de François de Rugy et Jean-Vincent Placé au PS ne masque pas la recherche à EELV, au PCF ou au PG d’une construction politique qui permette de contredire l’austérité. Cela tâtonne, hésite, se perd dans des postures, mais le besoin grandit.

La Fête de l’Humanité saura l’accueillir.

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16 août 2015 7 16 /08 /août /2015 22:55

Jean Ortiz - Dimanche, 16 Août, 2015

Le blog de Jean Ortiz.

 

J’ai grandi entre deux exils... en quelque sorte « doublement immigré » !

 

Souvenirs, souvenirs.

Photo : DR

Photo : DR

 

Au village ouvrier, nos maisons familiales, construites par un grand-père colosse-bourreau de travail, se touchaient. D’un côté l’exil politique, Enrique, mon père, le guérillero communiste, et de l’autre mes « abuelos » (grands parents) maternels, Alfonso et Isabel : l’exil économique. Pas de cloisonnement. Je passais de l’un à l’autre sans m’en rendre compte. Des deux côtés : la lutte légitime pour la dignité et la solidarité. On parlait l’espagnol, pas le français. Les « abuelos » y ajoutaient l’occitan, la langue à la fois soumise et résistante, la langue cousine qui leur permit de s’intégrer ; celle qu’ils apprirent tout naturellement dans un village où l’on parlait cette langue maternelle, l’occitan, dans les foyers, les bistrots, les rues, au marché ; mais où il était interdit à l’école d’employer des mots « patois ». L’impur et trop popu « patois » ! L’ascenseur scolaire n’a pas que des vertus... Le plurilinguisme menacerait la République, « hilh de puta » ! En réalité, il l’enrichit. Que les sceptiques lisent les écrivains, les poètes, Bernat Manciet, Frédéric Mistral, Max Roqueta, Robèrt Lafont, Joan Bodon... Qu’ils écoutent les chanteurs d’oc... Ils se convaincront de la nécessité (qu’elle vive) et de la beauté de l’occitan, aussi bien du tronc commun que des variantes des différents « pays » de langue d’oc : Chez nous, le « Volem viure al pais » avait un contenu de classe.


Mes grands-parents, nés à Salamanca, où même paraît-il les pierres étaient jadis franquistes, arrivèrent dans les années 1920. Racolés par une France en reconstruction, ils venaient des Asturies avec contrat de travail en poche et voyage payé, SVP ! Tapis rouge ! Et ils ne jouaient pas au PSG-Qatar, ce Qatar qui financerait aussi d’autres terrains d’affrontement... Dans les années 1920, la France, tout simplement, avait besoin de bras d’immigrés après la saignée de la Première Guerre mondiale, comme aujourd’hui sur les chantiers du BTP ou les services de voirie. Les Espagnols ne vinrent pas « manger le pain des Français » mais plutôt leur permettre de l’acheter. Comme ces « immigrés » du présent, qui rapportent plus qu’ils ne coûtent.

Rue du Castel (château), à Labastide-Rouairoux, les deux exils espagnols s’épaulaient, se prolongeaient. A la suite d’une initiative un peu folle de la Jeunesse communiste, relayée par les élus communistes au conseil municipal, la moyenâgeuse « rue du Castel » devint « Rue Commune de Paris », et la plaque apposée sur la maison d’Enrique.
Mon grand père maternel, bravasse, toujours de bonne humeur, maçon, poussait son charriot sur des kilomètres pour aller trimer, en chantonnant « Los mozos de Moleón ». Le moustachu Alfonso animait le Cercle des Espagnols du village. Les jours de carnaval, il prenait la « testa » d’un cortège (immigré) avec déguisements, danses et chants du nord de l’Espagne, flûtes et cornemuses ; et il entraînait les Français à sa suite... Un véritable impérialisme culturel à l’envers ! Afonso fit venir pour travailler au village frères et sœurs, (il colonisa Labastide!) et organisa même des manifs de soutien à la République espagnole. Dans sa grande majorité, l’exil économique prit parti pour « les rouges ».

La pauvreté de mes parents fit que mes « abuelos » maternels m’accueillirent chez eux, de l’autre côté du mur, et m’élevèrent. Alfonso était fier de chaque réussite aux examens « del Juanito », de mes candidatures pour le PCF (tonte obligatoire de la tignasse, et costume d’immigré qui a réussi), de mes meetings au village... Lorsque les foudres paternelles se déchaînaient, Alfonso servait de paratonnerre. Pour le remercier, mon frère Enrique (tradition espagnole) et moi, lui faisions les pires gentillesses, du genre peindre les tomates vertes en rouge... pour accélérer la révolution, l’aurore rouge... et partir en courant !

Restez à l’écoute ! Le clou est à venir ! (transition ex-abrupto). Mon arrière grand père maternel, Ricardo Hernandez le « madrileño », était un flambeur, un coureur, un buveur, un faux hidalgo « fausse classe », haut en couleurs. L’arrière-grand-père du fils de « rouge » fut, il fut... cocher du roi Alphonse 13, ouiouioui, c’est vrai de vrai, mon « tatarabuelo » cocher du roi battu par la République en avril 1931... et mon arrière « abuela » : repasseuse à la cour. Las de cocheter le roi, Ricardo abandonna un jour ses trois enfants et s’embarqua pour Buenos Aires, afin de s’y remplir les poches pendant quelques années. Les poches trouées, il revint au bercail et ne put même pas payer le taxi de la gare au domicile familial. Il n’avait que des gros billets disait-il.
La grand-mère Isabel, fluette et fragile, toute en délicatesse, noueuse comme un pied d’olivier et rompue au travail, au battoir du lavoir, syndiquée à l’usine textile Barthès (« remetteuse de fils »), nous faisait des « mantecaos », des « rosquillas », des « migas », chantait de si belles « habaneras » (« si a tu ventana viene, una paloma... »). A Madrid, elle dut servir chez les riches et chez le monarque bourbonneux et bambocheur (tradition familiale...)

Mon père, lui, préférait les « churros », à tel point qu’il se fit fabriquer une machine à churros semblable à une mitrailleuse de l’Ebre, et qui jamais ne fonctionna. Il en fut pour ses frais ; se faire ridiculiser par une machine à cracher des churros lorsque l’on a combattu le fascisme.... Et il n’avait pas le sens de l’humour, l’animal. Lors du dernier repas avant mon départ pour La Havane, afin d’y substituer le pote José et de m’essayer au journalisme pour « L’Huma », je lui parlai de la « libreta », le carnet de rationnement « égalitaire » des Cubains. Mal m’en prit. Pour lui, le rationnement, c’était Pétain, les topinambours, les rutabagas... Il se leva et me lança, sur un ton de commissaire politique peu enclin au dialogue : « si tu racontes des conneries avant de partir à Cuba, il vaut mieux que tu restes ici ! » Lorsque j’y repense, il appelait cela « les principes »... ne jamais abdiquer ni se vendre, ne rien lâcher, ne pas négocier « les principes », ne pas transiger sur l’essentiel. Il n’aimait pas ce que Santiago Carrillo était devenu. Et les « tontons » du dimanche non plus.
Ils venaient d’Albi, de Castres, de Carmaux, de Mazamet... pour se réunir discrètement à la maison et recréer un pays. Ils restaient malgré tout, valises à la main, des « exilés ». En 1950, Franco fit éliminer du dictionnaire officiel de la « Real Academia » le mot « exilé »... De ma chambre, j’entendais les éclats de voix de la réunion clandestine du PCE. Le journal « Mundo Obrero » arrivait de Paris avec la complicité des cheminots communistes français... Il était imprimé sur du papier très fin pour mieux le dissimuler. Les militants espagnols organisaient la solidarité, les souscriptions, les pétitions... pour tenter de sauver par exemple le dirigeant du PCE Julian Grimau, arrêté à Madrid et exécuté le 21 avril 1963 après une parodie de procès. L’annonce de sa mort, par une voix grésillante, sur nos ondes courtes du soir, « Radio España Independiente », « la Pirenaica », nous fit beaucoup pleurer, mais aussi se lever de nouveaux militants. Le gamin que j’étais apprit l’internationalisme. La voix de la « Pasionaria » remplaçait la grand-mère paternelle, si loin, si absente...
Pour joindre les trois bouts, Enrique, manœuvre dans la maçonnerie, avait construit, sur un morceau de montagne pentu, une maisonnette à lapins, poules, pigeons et cochon. Le jour des cochonnailles, on descendait le goret sur une sorte de brancard, tel un « paso » de Semaine sainte andalouse traversant le « barrio ». Il ne manquait que la « saeta » chantée du haut d’un balcon. Le pauvre porc, condamné à mort, hurlait plus fort qu’un toro dans l’arène. Le cortège prenait des allures de procession à la fois morbide et rigolarde.

Transition dialectique... Un bon article, comme un bon poème, m’a appris le poète démesuré Serge Pey, nécessite une bonne conclusion sans conclusion, parfois une anecdote qui n’est pas anecdotique...

Lorsque le « padre » Enrique organisait des voyages d’Espagnols, c’était pour gagner quelques sous afin d’aider les prisonniers politiques de la prison de Burgos et leurs familles...

Dans le bus, on chantait « Adiós mi España querida... yo soy un pobre emigrante », les trémolos pleurnichards de Juanito Valderrama, d’Antonio Molina...

Et on attendait la chute, qui n’allait pas tarder, du dictateur... Il mourra dans son lit en 1975, comme l’avait décidé le « monde libre », pour bons et loyaux services rendus. Le bus s’arrêtait à Saint-Pons, et en route pour la baignade, en Roussillon: à Argelès-sur mer !

Sans les barbelés, l’eau putride et les humiliations. Argelès-sur-mer. Quand j’y pense... Argelès. Pour exorciser l’exil ?


 

 

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15 août 2015 6 15 /08 /août /2015 20:23
Des républicains espagnols - AFP

Des républicains espagnols - AFP

Jean Ortiz - Vendredi, 14 Août, 2015

 

Être fils de réfugié politique, de « rouge », de Républicain espagnol, «d’étranger indésirable », « dangereux » (décrets de mai et novembre 1938, du gouvernement « centre-gauche » de Daladier), m’a contraint à devenir un gamin différent des autres. Je devais me protéger d’une menace omniprésente que je ressentais comme anxiogène ; et que je percevais comme injuste.

Je crois être vraiment né le jour où j’ai commencé à comprendre que j’étais fils de « rouge » espagnol, fils d’un déchirement, d’une souffrance ; que j’appartenais à une communauté bien définie, très politisée, qui, d’une certaine façon, m’anormalisait. Et j’ai progressivement donné du sens, du contenu de classe, de la colère, à ce statut « entre dos aguas »(« entre deux eaux »), à ces pulsions contradictoires ; sources aussi de fierté.

Être fils d’exilé politique oblige en quelque sorte à s’inventer une identité et des racines chercheuses, une histoire incertaine, entre imaginaire et nécessité, à se donner une « patrie » de valeurs, multiple, d’ici et d’ailleurs.

Mon père n’arrêtait pas de nous raconter sa Guerre d’Espagne, ses maquis, ses engagements communistes, les combats des guérilleros en France ; et il utilisait le plus souvent le « nosotros » (« nous ») , la première personne du pluriel. On avait l’impression qu’il voulait à la fois témoigner, transmettre et mettre en garde. Il lui fallait être sur ses gardes... A la suite d’une grande rafle, l’ « Opération boléro-paprika », le 7 septembre 1950, montée de toutes pièces par les autorités françaises (le gouvernement de René Pléven, dont François Mitterrand était ministre UDSR), contre principalement les communistes espagnols (288), le PCE, ses journaux, ses revues, sont interdits en France ; des guérilleros décorés à la Libération se retrouvent poursuivis comme « subversifs », « agents de l’étranger », et des militants déportés et assignés à résidence en Corse, en Algérie...

En « nettoyant » le Sud de la France, Paris donne des gages de bonne volonté anticommuniste à Franco, « sentinelle de l’Occident », et affaiblit par là même la lutte contre le franquisme...

En décembre 1951, Paris rétablit ses relations diplomatiques avec Madrid... Les militants communistes espagnols continuent à diffuser « Mundo Obrero » clandestinement, au nez et à la barbe de la police française. Les guidons de vélo ont des ressources que les pandores ignorent. En février 1945, pour donner de nouvelles preuves d’allégeance, De Gaulle et le gouvernement provisoire interdisent la presse de l’exil républicain ; le 2 mars 1945, les unités de guérilleros sont dissoutes. Plutôt Franco que les « rouges ». Circulez ! La « Guerre froide » fera le reste.

Dans l’exil en France, les attitudes politiques et mémorielles diffèrent. Il y a ceux qui racontent et d’autres , exilés antifascistes, également communistes, anarchistes, socialistes, parfois au sein d’une même famille, qui se murent dans la mémoire silencieuse afin de protéger leurs enfants, leurs études en pays étranger. Il faut « s’intégrer ». Déjà ! « S’intégrer ! » Renoncer à soi, à son identité... Tenter d’oublier les défaites et abandons successifs, le vécu trop douloureux de cette guerre d’extermination. Aujourd’hui, nombreux sont leurs fils (filles) et petits-fils (filles) qui « veulent savoir » et qui s’investissent dans le travail associatif de mémoire. Le temps a passé, malgré tous les malgrés ; mais il n’est jamais trop tard pour que vérité et justice adviennent...

Gamin, les récits de Enrique (la bataille de Madrid, Belchite, Teruel, Guadalajara, le passage de l’Ebre, la « Troisième Brigade mixte », la « Retirada », Argelès, Decazeville, la prison des grands-parents, nos sept fusillés) m’inquiétaient et me fascinaient à la fois . Je voyais Enrique comme un héros, doublé d’un « père martinet », arme à courroies destinée à stimuler l’ascenseur scolaire. Enrique me parlait en espagnol (il s’était inventé un « charagnol » pour le village), cette langue à mes yeux bizarre, qui m’était en même temps familière et étrangère. A l’heure du « classement scolaire» (quelle horreur !), le père inventait des citations de Lénine pour m’obliger à être parmi « les premiers », et à recevoir un prix des mains du maire, le jour de la fête des écoles (la Saint-Jean), devant le village rassemblé. Pour Enrique, garçon de ferme esclave très jeune chez les grands propriétaires manchegos (certains se portent encore fort bien), cette volonté que les enfants de « rouge », de prolétaires, de pauvres, réussissent leurs études, relevait de la revanche de classe et d’une sorte de bras d’honneur à tous ceux, les faussement « non-interventionnistes », « qui nous avaient reçus comme des chiens en France », dans des camps dits à l’époque « de concentration » par le ministre de l’Intérieur Albert Sarraut : Argelès, Barcarès, Saint-Cyprien, Gurs... L’enfer français. Des prisons de sable, de barbelés, du grillage, dans le froid de l’hiver 1939, pour ces premiers antifascistes. J’ai retrouvé des lettres du camp, bouleversantes, et de vieux cahiers de notes prises dans les « écoles », ateliers... que le PCE et la JSU (en ce qui concerne mon père), organisaient clandestinement, pour que les militants internés apprennent à lire et à écrire, se cultivent, se forment. Le savoir peut libérer... « L’éducation est le seul moyen de se débarrasser de l’esclavage » (José Marti). Ce n’est que plus tard que j’ai compris le pourquoi des citations fictives « empruntées » au père fouettard Vladimir Ilitch, du type : « Lenin dijo... », Lénine a dit ... étudier, étudier, étudier, et pour se reposer : changer de livre ! ». Comment aimer un tel bourreau livrophyle à 12 ans ?

Très jeune, j’ai donc été condamné en quelque sorte à hériter de l’histoire de ces « rouges » « étrangers dangereux » en France, fliqués par l’infâme « liste S », réprimés, discriminés, contraints au travail esclave dans les GTE ; ils prirent les armes les premiers et proportionnellement plus nombreux que les Français. J’ai dû assumer cette histoire, la prolonger. Etre fils de « rojo », de l’exil politique, m’a condamné à une certaine relégation, à une colère permanente, à une exigence dans l’engagement, à une différence assumée, revendiquée, alors que le droit à la différence n’est que toléré... J’ai donc peu à peu construit mon récit à partir d’un  éclatement du « moi », d’une sorte de marginalité contrainte et volontaire. Ce récit, cette mémoire historique, sont étroitement liés à mon milieu social, à ma génétique : fils de prolétaire espagnol communiste. Ce sont mes deux fils rouges, ma filiation sociale, culturelle, politique, dans un entre-deux géographique et personnel. Je n’étais pas tout à fait Français alors que j’étais né dans un village tarnais, rouge de surcroît, Labastide-Rouairoux, où le maire socialiste fit appel aux CRS contre les travailleurs lors de la grande grève textile de 1960. J’y ai connu les luttes partagées en commun, la soupe populaire, les « Agés » au kiosque, sur la place, la CGT de Frachon, Séguy, Krasu... alors outil puissant d’intégration, de solidarité.

Dans cet environnement de classe, je percevais et assumais ma différence, tout en la contenant. Un mélange fait de culpabilisation et de force, de fierté rouge...  « El orgullo comunista » : la satisfaction d’être coco. La crise et le racisme n’étaient pas ce qu’ils sont aujourd’hui, certes, mais dans la cour de récréation mes poings ont souvent paré au « putain d’Espagnol qui vient en France manger le pain des Français ». Nous étions les « barbares » de l’époque... Les puissants attisaient la guerre entre pauvres, mais il y avait du boulot pour tous. Un jour, humiliation suprême, ce vieux « « hussard de la République » d’instit me condamna à m’agenouiller sur une règle pour avoir bousculé un élève de CM1 ; il m’avait traité de « sale « espingouin » ou de « gavach », je ne sais plus . Déjà le monde à l’envers... les boucs- émissaires, la criminalisation des pauvres, les classes dangereuses, les « étrangers »... Calais-Argelès. Le monde est plein d’étrangers ! Argelès-Calais.

Ce « CV » de « fils de rouge », cette nostalgie d’avenir, me propulsent toujours et ne me poussent guère au consensus, ni à l’eau tiède, ni au plan de carrière, ni à m’intégrer au « système ». Le pire, c’est lorsque les révolutionnaires sont assimilés au « système ». A Labastide-Rouairoux, l’adhésion et le militantisme au PCF, le parti anticapitaliste qui structurait mon village ouvrier (en Occitanie ouvrière), créaient du lien, de la solidarité et de la conscience de classe ; aller au communisme, lire « l’Huma », c’était naturel. Fils de pauvres, nous étions la plupart conscients du pourquoi de l’être. L’exemplarité du mouvement ouvrier de ce village de grandes colères prolétaires a façonné des générations de rebelles. Je me souviens... Roger, Elie, Maria, Michel, Henri, Jacques... Aujourd’hui les usines textile ont fermé, sacrifiées sur l’autel de « l’Europe », de la « mondialisation » ; beaucoup d’ex rebelles ont vieilli (surtout en renonçant à leurs idéaux), la classe ouvrière repose au cimetière, le village se meurt, et le Front national cartonne, sur les cendres de l’espoir. Le dernier Républicain espagnol était Enrique l’étranger.

Fils de « rojo », j’ai hérité de cette République espagnole exilée et de ma Bastide prolétaire, toutes deux rouges, une aversion viscérale des fascistes, des « bourgeois », des faux-culs, des « collabos », des « jaunes », des politicards "lutte des places" et « toca manetas », serre mains compulsifs, de la « gauche de droite », toujours prête pour aller à Canossa, à Munich, à Maastricht, à Lisbonne...

Avec le temps, contrairement à ce que l’on dit souvent, je n’ai pas versé, ou pu verser, dans la sagesse.

Devenir sage : quel naufrage ! La crise d’adolescence, la révolutionnite, à plus de 60 rives, c’est terrible, contagieux, incontrôlable... mais tellement chouette !

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13 août 2015 4 13 /08 /août /2015 22:36
Israël - Palestine - Nicolas Bonnet - Jeudi, 13 Août, 2015 -L'Humanité
 Julien Jaulin/hanslucas - b Nicolas Bonnet Président 
du groupe 
PCF/Front 
de gauche 
à la mairie 
de Paris

Julien Jaulin/hanslucas - b Nicolas Bonnet Président 
du groupe 
PCF/Front 
de gauche 
à la mairie 
de Paris

« Le choix de faire “Tel-Aviv sur Seine” dans ce contexte est une maladresse de la part de la mairie. Ce que notre groupe a demandé, c’est que cette manifestation porte un message de paix, entre artistes palestiniens et israéliens. D’autant qu’aujourd’hui, Paris noue un partenariat avec Jéricho, Bethléem, Ramallah, donc, dans ce contexte, un an après les bombardements à Gaza, on aurait imaginé une très belle opération pour la paix. Si, aujourd’hui, on veut la construire, cela passe par l’organisation de rencontres entre les habitants de villes différentes. Je pense qu’au mois d’août, il y a possibilité de faire ce type d’événement culturel afin de rééquilibrer les choses et porter un message de paix. Et puis, le problème, c’est que l’opération “Tel-Aviv sur Seine” va être ultrasécurisée et pour moi, avoir des cordons de CRS, ça n’est pas la fête. »

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11 août 2015 2 11 /08 /août /2015 22:10

Polémique - Aurélien Soucheyre - Mardi, 11 Août, 2015 - L'Humani

 

La décision de la ville de Paris de célébrer le Tel-Aviv festif 
sur les berges parisiennes en tournant le dos à la réalité du conflit israélo-palestinien suscite la controverse et l’indignation.

DR

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La journée « Tel-Aviv sur Seine » aura-t-elle lieu ? La polémique enfle autour de l’opération organisée le 13 août par la Ville de Paris dans le cadre de Paris Plages. Au programme : « foodtrucks, DJ sets, animations ludiques… » peut-on lire sur le site Web de la capitale française, comme s’il était possible de dissocier complètement Tel-Aviv du conflit israélo-palestinien, et d’importer uniquement son côté festif sans se soucier de la situation sur place. « Tel-Aviv, ce n’est pas Copacabana. Tel-Aviv, c’est la capitale d’Israël », a tranché hier la conseillère municipale de Paris Danielle Simonnet (PG), qui demande soit l’annulation de l’événement, soit sa réorganisation en « manifestation en faveur de la paix, de la fraternité, de la lutte contre toutes les formes de racisme et d’antisémitisme, et de la reconnaissance de l’État palestinien ».

« Nous n’annulerons pas cette manifestation, car ce serait donner raison aux plus radicaux », rétorque le premier adjoint (PS) Bruno Julliard, quitte à froisser les communistes qui siègent au sein de la majorité. Consterné de ne « jamais avoir été associé ou informé » au sujet de cette initiative, le groupe PCF-Front de gauche du Conseil de Paris considère « qu’il n’est pas du rôle de la Ville d’organiser une telle opération de communication », alors que les « massacres survenus à Gaza » l’été dernier sont dans toutes les mémoires, et que des attentats ont été commis ces derniers jours par des « terroristes israéliens ». Ses élus demandent eux aussi l’annulation de la journée « au profit d’une initiative qui contribue à une paix juste et durable » et regrettent que Paris, jumelée à la fois avec Tel-Aviv et avec la ville palestinienne de Ramallah, ne se soit pas fixé d’emblée cet objectif à travers cette journée Paris Plages.

La ville de Paris s’entête 
à maintenir la journée telle quelle

« Pas d’amalgame entre Tel-Aviv, ville symbole de la tolérance et de la paix, et la politique brutale du gouvernement israélien ! » s’est fendu sur Twitter Bruno Julliard. Mais dans ce cas-là encore fallait-il axer la journée sur la paix, alors que l’appellation « Tel-Aviv sur Seine », qui importe le nom d’une ville israélienne sur les berges parisiennes, ne saurait être déconnectée des réalités d’un conflit qui suscite les passions au sein de l’opinion publique française. « Alors que Tel-Aviv est la capitale économique d’un pays dont le gouvernement d’extrême droite méprise quotidiennement le droit international et mène une politique brutale de colonisation des territoires palestiniens, comment penser que cette initiative puisse être dissociée du conflit israélo-palestinien ? » s’interrogent ainsi les élus communistes.

« Mais comment Anne Hidalgo a-t-elle pu choisir de politiser Paris Plages (…) au profit d’une force occupante : Israël ? » s’indigne même Jean-Claude Lefort, président honoraire de l’association France Palestine Solidarité, qui dénonce la volonté de se rassembler sur place de la Ligue de défense juive, groupe connu pour sa violence et ses actions extrémistes. S’inquiétant de possibles « risques graves pour l’ordre public », l’ancien député PCF indique que le Ministre de l’Intérieur ou le Préfet de Paris peuvent interdire l’événement. Ce motif a déjà été utilisé, l’an dernier, pour interdire deux manifestations qui appelaient à la fin des bombardements à Gaza… Une pétition en ligne demandant l’annulation de la journée a de son côté déjà recueilli plus de 15 000 signatures, au prétexte que cette « opération ne peut être considérée comme un simple événement culturel », et que Paris ne doit « pas être le théâtre du blanchiment de la politique israélienne ».

Le ton est depuis violemment monté sur les ondes et les réseaux sociaux, jusqu’à atteindre l’invective et les procès en antisémitisme. Le député UDI Meyer Habib a osé lâcher : « une partie de l’extrême gauche montre ici son vrai visage, celui de son obsession et de sa haine antijuive », usant du vieil et honteux adage selon lequel un opposant à la politique colonialiste du gouvernement israélien est forcément antisémite, le tout pour éviter le débat.

Tel-Aviv sur Seine, plage de discorde !
Jacques Tardi Mon indignation

Polémique - Jacques Tardi - Mardi, 11 Août, 2015 - L'Humanité

DR - Par Tardi 
Auteur et dessinateur 
de bande dessinée

DR - Par Tardi 
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 C’est mon indignation totale qui a motivé ce dessin. Un an après les massacres à Gaza, il faudrait que l’on fasse la fête sur les berges de la Seine. C’est de la provocation. C’est presque une insulte. C’est complètement obscène et irresponsable de la part de la Mairie de Paris. Il y a eu plus de 2 000 morts, et on fait comme si de rien n’était, comme si on voulait effacer les crimes de guerre. Cette commémoration festive des tueries est monstrueuse. On parle de culture, mais ce qu’il y a de culturel à Paris Plages, c’est surtout des recettes de cuisine et des raquettes… Tel-Aviv, ville de la tolérance ? Oui, au sens où elle tolère bien l’apartheid et l’occupation de la Palestine, même si je sais qu’il y a des Israéliens contre la colonisation. Quand au procès en antisémitisme, ça ne marche plus : on a le droit de s’exprimer sur la politique d’un état qui viole chaque jour le droit international. Ces accusations m’indiffèrent. Ce n’est pas le sujet.


 

Jacques Tardi 
Auteur et dessinateur 
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8 août 2015 6 08 /08 /août /2015 23:15

Nous faudra-t'il encore longtemps avoir honte de notre pays et de ceux qui le dirigent ?

 

 

Au moins François Hollande n’aura pas eu l’hypocrisie d’assister au Japon, aux côtés de Barak Obama, aux cérémonies du 70ème anniversaire des bombardements de Hiroshima et Nagasaki. Il a préféré se rendre en Egypte à l’inauguration du doublement du canal de Suez auprès du nouveau dictateur local, le maréchal Sissi. Il faut dire qu’à peine en place après un coup d’Etat, Sissi s’est montré un bon acheteur d’avions Rafale (même si c’est grâce à des prêts français…). L’Egypte se trouve au cœur d’une zone encore plus instable après les interventions impérialistes en Libye et en Syrie, encore plus demandeuse d’armes…

 

 

70 ans après Hiroshima, F. Hollande vante plus que jamais la « dissuasion nucléaire » et étend dangereusement son concept !

« Indépendance, liberté, capacité à faire prévaloir nos valeurs, voilà pourquoi nous devons chaque jour, assurer la permanence de la dissuasion nucléaire et être capables, à chaque instant, d’en améliorer encore l’organisation, le fonctionnement et les armes ». Voilà la phrase par laquelle Hollande a conclu le 19 février dernier, sur la base aéronavale d’Istres, son long discours définissant l’orientation de sa politique nucléaire militaire (texte intégral en lien sur le site de l’Elysée). Un hymne à l’arme nucléaire, comme tout son texte ! On comprend qu’il ne se soit pas envolé pour Hiroshima !

 

 

Partant d’une telle profession de foi, il est logique qu’il renvoie l’objectif du désarmement nucléaire aux calendes grecques et le réduise à un vœu pieux : « Je partage donc l’objectif, à terme, de l’élimination totale des armes nucléaires, mais j’ajoute : quand le contexte stratégique le permettra ». Ou encore : « La France doit être lucide. Elle sait qu’il ne suffit pas de proclamer le désarmement nucléaire immédiat et total, il faut que la réalité des actes de chacun soit cohérente avec les discours ». Tout est dit et répété plusieurs fois. Le quinquennat Hollande sera le premier où la France de diminuera pas, même simplement quantitativement, son arsenal nucléaire, ni son budget dédié à l’arme atomique, « sanctuarisé », à hauteur officiellement de 3,5 milliards d’euros par an.

 

La doctrine énoncée par Hollande donne tout leur (mauvais) sens aux efforts de la diplomatie française pour faire appliquer le Traité de non-prolifération (TNP). Il ne s’agit agir dans le sens général d’un abandon de l’arme atomique mais d’intervenir pour que de nouvelles puissances ne concurrencent pas les puissances impérialistes occidentales et leurs alliés. La politique française d’hostilité aux velléités supposées du régime iranien de se doter de la Bombe est directement subordonnée au souci de garantir la suprématie de l’impérialisme israélien dans ce domaine.

En termes d’idéologie, si l’on voulait vraiment encourager la non-prolifération, soulever les opinions publiques, légitimer le TNP, il faudrait s’y prendre à l’inverse d’Hollande qui affirme encore : « La Force de dissuasion, c’est ce qui nous permet d’avoir la capacité de vivre libres et de pouvoir, partout dans le monde, porter notre message, sans rien craindre, sans rien redouter, parce que nous sommes sûrs de la capacité que nous avons à nous défendre ». Avec un tel discours, il y a vraiment de quoi dissuader une nation qui voudrait se doter de l’arme nucléaire d’y renoncer !  Beaucoup peuvent légitimement ne pas se sentir moralement inférieures à l’impérialisme français, avec ses interventions françaises en Libye ou en Afrique, et voudraient desserrer la domination des grandes puissances…  La tentation nucléaire est encore accrue quand Hollande proclame, de façon très contestable, que « la dissuasion stimule nos efforts de recherche et de développement et contribue à l’excellence et à la compétitivité de notre industrie ». Tout est décidément bon dans la « dissuasion » nucléaire !

 

La même logique présidentielle – est-ce du cynisme ou du pragmatisme ? – se retrouve chez Hollande à propos de l’application du Traité d’interdiction des essais nucléaires. Son entrée en vigueur est sa « première priorité », puisque « la France a fait la démonstration que la renonciation complète, irréversible aux essais nucléaires était compatible avec le maintien d’une dissuasion crédible ». Entre 1995 et 1997, sous Chirac – on s’en souvient -, l’industrie nucléaire militaire française a eu encore besoin de quelques essais grandeur nature à Mururoa pour adapter ses simulateurs. Maintenant que c’est fait pour l’armée française, comme pour les Etats-Unis, empêchons les autres de passer cette étape…

Par rapport justement à Chirac ou même à Sarkozy, le discours de Hollande, inauguré dès son élection par sa première visite officielle en juillet 2012 à un sous-marin nucléaire à Brest, exprime une inflexion. Jusque-là, la dissuasion était un mal et une dépense nécessaires pour se défendre. Aujourd’hui pour Hollande, elle est associé la liberté, à la « garantie que les engagements internationaux de la France seront toujours honorés, même si l’emploi de l’arme nucléaire n’est concevable que dans des circonstances extrêmes de légitime défense. »

 

La ligne qui prévalait sous Chirac et Sarkozy était évidemment hypocrite. Mais la libération de la parole présidentielle, avec Hollande, représente une nouvelle étape extrêmement inquiétante. La menace se précise, au-delà du rappel des grands principes, de la fable, de la dissuasion, de la mise au point d’armes atomiques françaises opérationnelles dans des conflits « limités » (c’est l’objectif avoué des essais en laboratoire de produire des bombes adaptées à cet échelle d’objectif).

 

Décryptons à nouveau le discours du Président : « C’est la responsabilité suprême du Président de la République d’apprécier en permanence la nature de nos intérêts vitaux et les atteintes qui pourraient y être portées.

L’intégrité de notre territoire, la sauvegarde de notre population constituent le cœur de nos intérêts vitaux. Quels que soient les moyens employés par l’adversaire étatique nous devons préserver la capacité de notre nation à vivre. Tel est le sens de la dissuasion nucléaire.

Néanmoins, je ne peux exclure qu’un adversaire se méprenne sur la délimitation de nos intérêts vitaux. C’est pourquoi je veux rappeler ici, que la France peut, en dernier ressort, marquer sa volonté à défendre nos intérêts vitaux par un avertissement de nature nucléaire ayant pour objectif le rétablissement de la dissuasion. »

Les deux dernières phrases, soulignés par nous, sont les plus explicites et effrayantes : « par un avertissement de nature nucléaire » a-t-il dit.

 

Quant à l’appréciation présidentielle unilatérale, suivant l’idéologie dominante, « de nos intérêts vitaux », elle coïncide – ce n’est pas une surprise – avec ceux de l’Union européenne du capital et de l’OTAN. Hollande ne pouvait pas être plus clair: « La définition de nos intérêts vitaux ne saurait être limitée à la seule échelle nationale, parce que la France ne conçoit pas sa stratégie de défense de manière isolée, même dans le domaine nucléaire. Nous avons affirmé à de nombreuses reprises, avec le Royaume Uni, avec lequel nous avons une coopération sans équivalent, cette conception. Nous participons au projet européen, nous avons construit avec nos partenaires une communauté de destin, l’existence d’une dissuasion nucléaire française apporte une contribution forte et essentielle à l’Europe. La France a en plus, avec ses partenaires européens, une solidarité de fait et de cœur. Qui pourrait donc croire qu’une agression, qui mettrait en cause la survie de l’Europe, n’aurait aucune conséquence ?

C’est pourquoi notre dissuasion va de pair avec le renforcement constant de l’Europe de la Défense. »

Puis ensuite : « Je veux également préciser notre relation avec l’Alliance Atlantique. L’Alliance Atlantique a une vocation nucléaire et les forces stratégiques indépendantes, comme la France et le Royaume-Uni en disposent, ont un rôle spécifique à jouer et contribuent à la dissuasion globale.

Ce constat, fait par tous, n’implique pas de changement de posture de notre pays. La France ne participe pas aux mécanismes de planification nucléaire de l’OTAN et la France ne participera pas à ces mécanismes. Ce principe demeurera. En revanche, la France souhaite contribuer à la définition de la politique nucléaire de l’Alliance. A cet égard, tous les pays membres de l’OTAN doivent faire preuve de constance et de détermination dans cet engagement. »

Sur ce dernier point, il n’y a rien de nouveau dans l’aveu, déjà fait depuis longtemps, que la soi-disant « indépendance nationale » de la France, avec la dissuasion nucléaire, n’est rien d’autre que le prélèvement sur la richesse produite par les travailleurs français pour la défense conjuguée des intérêts impérialistes américains et européens.

 

Aujourd’hui des armes nucléaires de dissuasion dirigées contre qui ?

Hollande doit admettre que, pour l’instant, « la France n’a pas d’ennemi déclaré ».

Mais… il dénonce quand même la Syrie de Bachar El-Assad qui « a brisé un tabou fondamental de notre système de sécurité collective » en utilisant prétendument des armes chimiques et contre lequel « il a fallu recourir à la menace ». Grâce à Bachar et au tabou qu’il aurait levé, il serait ainsi plus aisé de faire accepter l’utilisation d’armes de destruction massive ? Horreur !

Hollande évoque aussi Daesh et « l’attaque informatique contre Sony », qu’il semble difficilement envisageable de combattre avec des bombes nucléaires… Mais pour Hollande, « des surprises, voire des ruptures sont possibles ». Surtout qu’auparavant, il a mentionné la crise ukrainienne… On devine quelle « agression d’origine étatique » pourrait être imaginée, comme au temps de la guerre froide mais avec un rapport de force bien différent.

 

Communistes, progressistes, nous avons toutes les raisons d’être inquiets et de ne pas sous-estimer l’importance de la lutte, EN FRANCE, pour le désarmement nucléaire.

Bien sûr, nous savons que les propos de Hollande suivent aussi les intérêts et la propagande du lobby militaro-industriel du nucléaire. Mais cela n’en diminue pas pour autant le danger des bombes atomiques. Pour nous, commémorer les crimes impérialistes d’Hiroshima et Nagasaki ne relève pas du rituel de convenance !

Bien sûr, nous savons que le lobby militaro-industriel conventionnel peut également contester, de façon tout aussi intéressée, les dépenses dirigées vers le nucléaire et défendre hypocritement un désarmement nucléaire (comme des socialistes comme Rocard et Quilès peuvent en être les porte-parole). Certains avocats de l’impérialisme français estiment aussi bien plus efficaces pour les intérêts qu’ils défendent de promouvoir une autre militarisation. Mais pour nous, combattre l’une n’empêche pas de combattre l’autre manifestation militariste de l’impérialisme.

 

Communistes, la situation menaçante appelle que nous reprenions le flambeau pacifiste de nos camarades qui, comme Frédéric Joliot-Curie, en connaissance de cause, initièrent et firent signer à des millions de travailleurs l’Appel de Stockholm pour l’abolition de l’arme nucléaire.

Peu importe pour nous (c’est très disproportionné le de mentionner) qu’un politicien comme Mélenchon, lié à Dassault, affiche un chauvinisme révulsant et vante une conception trompeuse de l’indépendance nationale par la dissuasion nucléaire.

Communistes, finissons aussi de solder les erreurs et même reniements décidés au nom du Programme commun dans les années 70, dont le rapport Kanapa de 1977, qui convertit le PCF à l’acceptation de l’arme nucléaire française, présentée illusoirement comme potentiellement nationale. Si le PCF en est petit à petit revenu, il importe d’être beaucoup plus clair. Interrogé en 2012 sur la proposition de Rocard de supprimer l’arme nucléaire française, Pierre Laurent n’est pas allé plus loin que d’estimer « que sa proposition méritait vraiment réflexion et que la France pourrait prendre l’initiative pour relancer le désarmement nucléaire ». Avec Hollande ?

 

Communistes, sur cette question vitale, nous pouvons avoir des propositions de lutte graduées et claires et mobilisatrices :

-          Pour une définition des intérêts vitaux du pays englobant exclusivement la défense de son intégrité territoriale et la sauvegarde de sa population.

-          Pour une sortie de la France du commandement intégré de l’OTAN, de l’OTAN et de toute organisation de l’Europe de la défense.

-          Pour le retour en France de tous les soldats français engagés sur des théâtres extéieurs.

-          Pour l’arrêt des essais nucléaires en laboratoire et leur classement dans les recherches prohibées par le Traité d’interdiction des essais nucléaires.

-          Pour la mise en accusation du budget totalement stérile consacré à l’arme nucléaire (3,5 milliards par an officiellement), en rapport avec les nécessaires dépenses publiques et sociales.

-          Pour une conversion vers le civil et d’autres technologies du secteur militaro-nucléaire français.

-          Pour un désarmement nucléaire total et unilatéral de la France.

-          Pour dans le monde, « l’interdiction absolue de l’arme atomique, arme d’épouvante et d’extermination massive des populations » comme y exhortait l’Appel de Stockholm.        

 

 

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1 août 2015 6 01 /08 /août /2015 22:30

Voici le dernier article de notre ami Salim Lamrani au sujet de la dette grecque.

25 vérités de l’économiste Thomas Piketty sur la dette grecque !

L’auteur de l’ouvrage Le capital au XXIe siècle, Thomas Piketty,  dénonce l’hypocrisie de la troïka et du Fonds monétaire international au sujet de la question de la dette

 

1.      Par le passé, les dettes publiques ont été bien plus importantes que la dette actuelle de la Grèce. Celle-ci s’élève à 312 milliards d’euros et représente 170% de la production annuelle du pays. La dette de la Grèce est en réalité dérisoire car l’économie du pays ne représente que 2% du PIB de la zone Euro. La dette de la Grèce ne représente donc qu’à peine 3% du PIB de la zone Euro et ne constitue pas un danger pour l’équilibre économique de l’Europe.

 

2.      Les grandes puissances européennes telles que la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni ont déjà eu par le passé, notamment au XIXe et au XXe siècle, une dette supérieure à 200% de leur PIB. A chaque fois, une solution a été trouvée.

 

3.      « Au XXe siècle, la France et l’Allemagne sont les deux pays par excellence qui n’ont jamais remboursé leur dette publique ».

 

4.      « Il y a quelque chose d’ironique » à exiger de la Grèce un remboursement impératif de sa dette en oubliant que « l’Europe s’est construite après la Seconde Guerre mondiale sur un certain nombre de principes, et notamment sur l’oubli des dettes du passé pour investir dans l’avenir ».

 

5.      Ainsi, en 1953, l’Europe a décidé collectivement d’annuler toute la dette extérieure de l’Allemagne parce qu’elle avait « fait le choix de l’avenir ».

 

6.      Il existe plusieurs méthodes face au problème de la dette. La méthode lente et inefficace, qui est actuellement appliquée à la Grèce, consiste à demander à la nation d’accumuler des excédents budgétaires (recettes tributaires supérieures aux dépenses publiques) et de les allouer au remboursement des créances. Elle a le défaut de s’étaler sur la durée, plus d’un siècle, d’inhiber la croissance économique et d’avoir un coût social très élevé.

 

7.      « Quand on dépasse une certaine ampleur de dette publique, il faut utiliser des méthodes plus rapides ». Il en existe trois qui ont été utilisées par le passé : l’inflation modérée, les impôts exceptionnels sur les patrimoines privés et surtout les annulations de dettes.

 

8.      « Il y a eu des annulations de dettes dans le passé et il y en aura dans l’avenir ».

 

9.      « Les gouvernements n’ont pas le courage de mettre [le sujet de l’annulation de la dette] sur la table », qui est pourtant une chose inévitable si l’on veut sortir de la crise et « le plus tôt serait le mieux ».

 

10.  On présente le peuple grec comme vivant au-dessus de ses moyens. Pourtant, actuellement, sous le gouvernement d’Alexis Tsipras, le budget de la Grèce est à l’équilibre, sans le service de la dette. Il y a même « un léger excédent primaire » équivalant à 1% du PIB en 2015, ce qui représente 1,83 milliards d’euros. Le remboursement de la dette devient insoutenable, surtout si l’on prend en compte le fait que les banques privées ont octroyé des prêts à la Grèce à des taux usuraires pouvant atteindre les 18%, rendant ainsi la créance mathématiquement impayable.

 

11.  Les institutions financières internationales exigent de la Grèce, en vertu des accords imposés en 2012, qu’elle alloue 4% de son PIB au remboursement de la dette pendant les 30 prochaines années. « Le budget total de tout le système de l’enseignement supérieur grec représente moins de 1% du PIB. Cela revient donc à demander au contribuable grec d’allouer, pendant les 30 années qui viennent, quatre fois plus d’argent pour rembourser la dette du passé que tout ce qui est investi dans l’appareil de formation supérieure du pays. Est-ce la bonne façon de préparer l’avenir. Évidemment, non ! Donc, c’est absurde ».

 

12.  « On n’a jamais demandé, et fort heureusement, à l’Allemagne, à la France et aux pays européens au lendemain de la Seconde guerre mondiale de faire cela. On a procédé à des annulations de dettes et c’est cela qui a permis la reconstruction de l’Europe dans les années 1950. On a pu se libérer du fardeau de la dette et investir les ressources publiques dans les infrastructures, l’éducation et la croissance ».

 

13.  « L’Europe, par le traité budgétaire de 2012, fait le choix britannique du XIXe siècle, de la pénitence pendant des décennies et des décennies, plutôt que le choix européen de l’après-guerre qui a consisté à se projeter dans l’avenir ».

 

14.  « Il y a une amnésie historique qui est extrêmement grave. L’ignorance historique de la part de nos dirigeants est absolument consternante ».

 

15.  « Le gouvernement français a une très grosse responsabilité » dans cette situation en refusant de s’opposer à l’intransigeance de l’Allemagne. « Hollande doit prendre ses responsabilités et dire que la restructuration de la dette, c’est maintenant ».

 

16.  Sans geste fort, il y a un risque de « prolonger la période d’incertitude », qui a un gros impact sur la croissance, et de « replonger la Grèce dans la récession, ce qui est extrêmement grave ».

 

17.  « Il n’y a pas plus de problème de la dette en Europe, qu’au Japon ou qu’aux États-Unis ».

 

18.  « Il y a beaucoup d’hypocrisie dans tout cela car les banques françaises et allemandes sont très contentes de retrouver les actifs financiers des riches Grecs qui sont transférés dans ces mêmes banques, et évidemment on ne transmet pas l’information au fisc grec », privant ainsi l’État hellénique de sources de revenus fondamentales, et se faisant complice de la fraude fiscale à grande échelle.

 

19.  Depuis 2010, les institutions financières internationales ont commis « d’énormes erreurs en Grèce ». « Même le FMI a reconnu avoir sous-estimé les conséquences des mesures d’austérité en termes de récession ».

 

20.  Ces mesures d’austérité « ont conduit au gonflement démesuré de la dette » grecque car le PIB a chuté de 25% entre 2010 et 2015. « C’est cela qui a fait monter la dette à 170% du PIB alors qu’elle n’était que de 110% ».

 

21.  « Je me place du point de vue des jeunes générations grecques. Sont-ils responsables des actes d[u Premier Ministre] Papandreou en 2000 et 2002 ? Elles ne sont pas plus responsables de ces erreurs que les jeunes Allemands des années 1950 ou 1960 n’étaient responsables des erreurs précédentes. Dieu sait pourtant que les gouvernements allemands avaient fait des bêtises bien plus graves que celles des gouvernements grecs ».

 

22.  « L’ensemble des dettes de la zone euro doit être restructuré. Il faut en effacer une partie comme cela s’est toujours passé dans l’histoire ».

 

23.  « Cela fait six mois que le gouvernement grec demande une restructuration de la dette », se heurtant à chaque fois à un refus obstiné de la part de l’Euro-groupe.

 

24.  Pourtant, en 2012, l’Europe avait « promis aux Grecs que lorsque le pays serait en situation d’excédent léger, on renégocierait le montant de la totalité de la dette ». Aujourd’hui, l’Europe refuse de tenir sa promesse.

 

25.  « Les apprentis-sorciers qui prétendent que l’on va expulser un membre de l’Union européenne pour discipliner les autres sont extrêmement dangereux. L’idéal européen est en passe d’être détruit par ces décisions d’apprentis-sorciers ».

 

 

25 vérités de l’économiste Thomas Piketty sur la dette grecque !
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28 juillet 2015 2 28 /07 /juillet /2015 22:03
Une Europe sociale et solidaire ! ..... Les arguments, RIEN QUE LES ARGUMENTS !

Prenez le temps de lire ceci : ....Une Europe sociale et solidaire, texte de notre camarade et ami Jean-pierre Femminino

Une Europe sociale et solidaire ! ..... Les arguments, RIEN QUE LES ARGUMENTS !

Propositions :

 

  • l’UE doit mettre un terme aux réformes aboutissant à la marchandisation de la santé, la mise en concurrence et la privatisation des services

  • L’UE doit élaborer un modèle social européen faisant de la santé un droit fondamental

  • Nous soutenons la charte de Barcelone, proposée par le Parti de la Gauche Européenne, pour de nouveaux indicateurs de santé

  • La création d’un pôle public européen du médicament

  • Une Europe respectant le Droit des Femmes à avorter


L’accélération des réformes libérales dans l’Union Européenne plonge l’hôpital public et les systèmes de santé dans la crise. Nous refusons les réformes des systèmes de santé de l’UE qui visent à la marchandisation, la mise en concurrence et la privatisation des services. Le marché de la santé a été évalué à 3 500 milliards de dollars par an. Les réformes de l’hôpital en cours tendent à transférer sur le privé les activités rentables. Les populations non solvables devront se contenter de soins au rabais. Roselyne Bachelot déclarait imprégner « la politique de santé française d’une couleur européenne ». Son Europe est celle du traité constitutionnel européen, repris dans le traité de Lisbonne, où la santé reste subordonnée à une logique libérale. De Maastricht jusqu’à Lisbonne, le rationnement comptable des dépenses publiques, la diminution des dépenses remboursées deviennent la règle.

L’Europe libérale abandonne la notion de service public pour celle « de service d’intérêt général » dont les missions peuvent être assumées par des opérateurs privés, entérinant la primauté de la finance sur celui d’utilité sociale. Si le Parlement européen s’est prononcé pour une exclusion des services sociaux et de santé du champ d’application de la directive Services (rapport Gebhardt) ainsi que pour une directive sectorielle sur les services sociaux et de santé d’intérêt général (rapport Rapkay), la question du contenu de cet encadrement communautaire spécifique est aujourd’hui clairement posée dans le cadre du rapport sur les SSIG (rapport Hasse-Ferreira), mais aussi avec le « Pacte pour l’Euro + », plus clairement appelé aussi Pacte pour la Compétitivité.
Ce débat est éminemment politique, car il touche à la nature même de notre modèle social. Les services sociaux et de santé d’intérêt général se trouvent aujourd’hui au cœur du débat. Ce débat renvoie à la question centrale du rôle que l’on veut faire jouer aux autorités publiques dans une économie de marché intégrée, à savoir veiller à faire de la santé une marchandise comme les autres, au mépris du respect des libertés fondamentales, celle notamment de garantir l’accès aux services essentiels. Aujourd’hui nous en voyons les résultats : un marché assurantiel florissant et une chute de la mutualisation
[les adhérents de la MGEN comprendront bien ce dont nous parlons, Ndlr], débouchant sur un renoncement aux soins de plus en plus important, à une régression de notre pays. Aujourd’hui il se retrouve à la 14ème place au plan mondial. Cela est vrai aussi des services sociaux de la Mutualité, soumis de fait à la rentabilité, avec comme conséquence la fragilisation de nombreuses structures de santé, comme par exemple l’ensemble des centres de santé des Bouches du Rhône.

Nous refusons la modification demandée par notre gouvernement, au nom de la libre prestation de services, du régime d’habilitation des établissements sociaux et médico-sociaux pour permettre à des prestataires européens d’exercer de manière temporaire et occasionnelle en France. La déréglementation relative aux dispositifs médicaux se fera aussi au détriment de la sécurité des patients.
L’adoption, en juin dernier, du rapport De Rossa sur l’avenir des SSIG, à Strasbourg, en commission, veut inciter le Parlement Européen à passer à l'acte sur les SSIG, afin d’adapter leurs missions et leur mode d'organisation aux lois de la concurrence. Un véritable modèle social européen devrait faire effectivement de la santé un droit fondamental pour tous les citoyens, basé sur la solidarité. Les communistes considèrent qu’il faut tout à la fois exiger le retrait de la loi HPST, et œuvrer à une politique sociale européenne alternative favorable aux peuples d’Europe et non aux multinationales.

Une politique de santé alternative en Europe comme en France exige à l’hôpital, comme dans tous les services sociaux, de substituer à la logique marchande la logique de la personne. La charte de Barcelone, écrite par le Parti de la Gauche Européenne, sur la précarité et la santé, exigeant un travail digne pour tous, peut constituer un point d’appui vers la construction d’une sécurité d’emploi et de formation en Europe ; d’autres indicateurs de santé devraient être intégrés comme la lutte contre la pollution, contre les inégalités de santé ou pour de meilleures conditions de logement pour tous. Un droit explicite à la Sécurité sociale solidaire doit être reconnu. Son développement, en dynamique du financement, doit être garanti, alors que sa fiscalisation conduit à rationner les financements tout en les reportant sur les ménages. Le principe de l’accès gratuit et précoce aux soins pour tous, le développement de la prévention, de la coordination des soins devrait être promus.

Mais c’est aussi une Europe hostile au Droit des Femmes, dans laquelle s’inscrit récemment en France, la remise en cause du budget du Planning familial, une Europe qui glisse fortement sur l’idée de « droit à la vie », contenue dans le TCE, sans référence au droit des femmes à disposer librement de leur corps.
Les dogmes économiques qui dominent, tendent à déstructurer les systèmes de santé solidaires, alors que ceux-ci constituaient une pièce décisive de la régulation du modèle social européen. Les raisons invoquées pour mener des réformes marquées par le sceau du libéralisme sont : le vieillissement démographique, le coût des technologies médicales modernes, mais aussi le chômage et ses conséquences sur le financement de l’assurance maladie. Les axes privilégiés des réformes résident, sous couvert de décentralisation, dans la séparation des rôles entre fournisseurs et acheteurs de soins selon le principe du « quasi-marché » ainsi que sur la « responsabilisation du patient ». On vise en réalité la limitation de la seule demande remboursable de soins et la contrainte des dépenses publiques de santé. Nous défendons un financement lié à l’entreprise, lieu où se créent les richesses, alors que la volonté libérale est de fiscaliser le financement des systèmes de santé.

La concurrence s’accommode mal de la démocratie
L’U. E. préconise que les instances élues comme les conseils d’administration des hôpitaux, doivent voir leur rôle limité tandis que les décisions seront prises par des commissions nommées par le pouvoir. N’est-ce pas ce que préconise la Loi Bachelot ou encore ce que l’on appelle la Gouvernance de l’Assurance Maladie avec une organisation technocratique à laquelle ne seront associés ni les syndicats ni les élus.
L’Europe doit agir pour une amélioration de la santé dans les pays en développement ce qui représentera aussi un bienfait et une nécessité pour les systèmes de soins européens.


 

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18 juillet 2015 6 18 /07 /juillet /2015 21:28

Rosa Moussaoui - Vendredi, 17 Juillet, 2015 - L'Humanité

 

 

Une victoire à la Pyrrhus est une victoire (généralement militaire) obtenue au prix de terribles pertes pour le vainqueur.

 

 

L'expression est une allusion au roi Pyrrhus Ier d'Épire, dont l'armée souffrit de pertes irremplaçables quand il défit les Romains pendant sa guerre en Italie à la bataille d'Héraclée (sur la commune d'Héraclée de Lucanie) en 280 av. J.-C. et à celle d'Ausculum en 279 av. J.-C.

L'expression est une allusion au roi Pyrrhus Ier d'Épire, dont l'armée souffrit de pertes irremplaçables quand il défit les Romains pendant sa guerre en Italie à la bataille d'Héraclée (sur la commune d'Héraclée de Lucanie) en 280 av. J.-C. et à celle d'Ausculum en 279 av. J.-C.

Manifestation contre les mesures d’austérité à Bruxelles le 15 juillet. PHOTO THIERRY ROGE/AFP/BELGA Photo : Thierry Roge/AFP/Belga

Manifestation contre les mesures d’austérité à Bruxelles le 15 juillet. PHOTO THIERRY ROGE/AFP/BELGA Photo : Thierry Roge/AFP/Belga

Avec une majorité de membres du comité central opposés à la ratification de l’accord, 
Syriza entre dans une dangereuse zone de turbulences. Les appels à préserver la cohésion 
du parti se font pressants, alors que des élections anticipées se profilent à l’automne.

 

Athènes (Grèce), envoyée spéciale. Au son des détonations, manifestants et badauds ne tressautent même plus. Mercredi soir, alors que la Vouli, le Parlement grec, s’apprête à entériner, avec les voix de l’opposition, le sévère plan d’austérité que le premier ministre Alexis Tsipras qualifie luimême de catalogue de « réformes libérales » propres à entretenir la récession, le ballet des policiers antiémeute, sur la place Syntagma, entre flammes des cocktails Molotov et fumée des grenades lacrymogènes, rappelle les nuits athéniennes tendues de juin 2011, avant la signature du deuxième mémorandum.

À quelques mètres de là, sur les bancs du Parlement, commence un rude débat, qui se conclura par l’adoption, à 229 voix contre 64 et 6 abstentions, du bien mal nommé « accord » de Bruxelles, signé par le gouvernement grec sous la menace d’une ruine planifiée de l’économie du pays. Le projet de loi, présenté en urgence aux députés, n’est entériné qu’avec l’appui de l’opposition. Les Grecs indépendants de Panos Kamménos soutiennent le texte mais dans les rangs de Syriza, 6 députés s’abstiennent et 32 votent contre. Parmi ces voix dissonantes, celle de la présidente de la Vouli, Zoé Konstantopoulou, qui s’élève contre un odieux chantage, tout en faisant l’éloge de Tsipras, celle du ministre de l’Énergie Panayotis Lafazanis, indigné par le « terrorisme » et le « colonialisme » des créanciers et celle de l’ex-ministre des Finances Yanis Varoufakis, révolté par un protocole aux allures de « traité de Versailles ».

 

Tsipras, lui, exhorte les siens à voter oui, tout en évoquant un accord avec lequel il est en désaccord, et des mesures qui « ne profiteront pas à l’économie ». Même s’il jouit toujours du large soutien d’une opinion grecque, terrorisée par la perspective d’un effondrement financier et d’une expulsion de la zone euro, il sait sa majorité parlementaire perdue, et prend des accents de chef de guerre qui vient de perdre une bataille cruciale. « Nous avons affronté, dans un combat inégal, de puissants pouvoirs financiers, dit-il. Le peuple grec sait distinguer entre ceux qui perdent une bataille déséquilibrée et ceux qui rendent les armes. »

C’est que les menaces n’ont pas pris fin au sortir du tragique sommet européen du 12 juillet. Instrument du coup d’État financier, la Banque centrale européenne a attendu le lendemain du vote à la Vouli pour desserrer le nœud coulant en relevant le plafond des liquidités d’urgence dont dépendent les banques grecques.

Alors que se profile une sérieuse crise politique, Tsipras ne pouvant gouverner sans Syriza, la Grèce, toujours sous pression, pourrait aller, à l’automne, à de nouvelles élections anticipées. 

 

Alors que les Grecs accueillaient avec soulagement, ce jeudi, la bouffée d’air consentie par la BCE, après trois semaines d’état d’exception financier (les banques devraient ouvrir de nouveau leurs portes lundi), sur le terrain politique, l’incertitude régnait toujours, dans l’attente d’un remaniement annoncé. Étaient cités, entre autres, le ministre de l’Énergie Panayotis Lafazanis, qui affirmait la veille à la Vouli tenir sa démission à disposition de Tsipras, s’il le souhaitait, et Dimitris Stratoulis (Sécurité sociale). Tous deux sont, il faut le dire, en première ligne des privatisations et de la réforme des retraites exigées par les créanciers. Les ministres adjoints Nadia Valavani (Finances), Costas Issychos (Défense) et Nikos Chountis (Affaires européennes) avaient, eux, déjà officialisé leur départ du gouvernement. Élue par les députés, la présidente de la Vouli, Zoé Konstantopoulou, qui évoquait mercredi soir, dans un discours sans concession, « un jour noir pour la démocratie », semble, elle, déterminée à rester au perchoir. Au sein du cabinet Tsipras, on n’écartait plus, toutefois, la perspective d’élections anticipées à l’automne. « Il est très possible que des élections aient lieu en septembre ou octobre, en fonction de l’évolution de la situation. Ce sera le résultat d’une évaluation globale de la situation, pas seulement par le gouvernement », a expliqué le ministre de l’intérieur Nikos Voutsis à l’antenne de la radio Sto Kokkino, proche de Syriza. Des membres du gouvernement confiaient au même moment n’avoir appuyé l’accord de Bruxelles que pour conjurer la menace du chaos économique promis à Tsipras. « Ce n’est pas tenable. Le premier ministre ne peut pas gouverner sans majorité, contre Syriza, avec le secours des voix de l’opposition. Le retour aux urnes, à court terme, est inévitable », juge un ministre. Au sein du parti, la situation est tout aussi incertaine et « les débats d’autant plus durs que tout semble instable », déplore une députée qui a choisi l’abstention. Avec une majorité de membres du comité central opposés à la ratification de l’accord, Syriza entre en effet dans une dangereuse zone de turbulences et les appels à préserver la cohésion du parti dans cette tempête se font pressants. « Toute la direction de Syriza s’accorde sur le fait que le gouvernement grec a dû faire face, ces derniers jours, à un coup d’État économique sans précédent. Cela laissera des traces et pèsera à jamais sur l’Europe et sa direction, explique Rania Svigkou, membre du secrétariat politique et porte-parole du parti. Cet accord est le résultat d’une capitulation obtenue par le chantage, dans un contexte où le mandat de négociation restait dans le cadre de la monnaie unique. Indépendamment des points de vue, nous partageons tous la même volonté de préserver l’unité de Syriza. »

Tsipras, en effet, n’a pas perdu 
la confiance des Grecs

Devant les députés, Tsipras affichait lui, mercredi, la ferme intention de continuer le combat, malgré des marges de manœuvre étroites, pour ne pas dire réduites à néant par le retour de la troïka, et les abandons de souveraineté inédits imposés à Bruxelles. « Nous n’avons pas perdu le soutien de la société. Nous ne permettrons pas qu’un gouvernement de gauche soit renversé. Nous ne ferons pas à nos opposants la faveur d’être une parenthèse », a-t-il insisté, en promettant de s’attaquer à la corruption et aux intérêts enchevêtrés impliquant les oligarques grecs. Le paradoxe de cette situation, c’est que Tsipras, en effet, n’a pas perdu la confiance des Grecs, majoritairement attachés au principe d’un compromis permettant le maintien de la Grèce dans la zone euro et prêts à faire peser sur ses homologues et sur les créanciers la responsabilité d’un mauvais accord auquel personne ne croit, pas même l’opposition qui l’a ratifié. Toujours profondément discréditée, celle-ci ne peut, malgré l’appui grossier de Jean-Claude Juncker, prétendre incarner une alternative, six mois après la sévère sanction des urnes confirmée avec fracas par la cuisante défaite du « oui » au référendum. Tsipras joue-t-il encore la montre ? Dans un entretien à l’ERT, mardi soir, il a admis que la défaite grecque n’écartait pas pour autant, avec certitude, le scénario du Grexit, que défend toujours l’impitoyable ministre allemand des Finances, 
Wolfgang Schäuble. « J’ai cru que cette Europe pouvait être changée, que le droit pouvait primer sur les intérêts des banques. Nous étions seuls, face à tout le système financier mondial. La vérité, c’est que cet accord a été imposé de manière cruelle, a expliqué le premier ministre grec. Mais c’est pour eux une victoire à la Pyrrhus, qui finira par se retourner contre eux. Durant cinq mois, nous avons semé des graines de démocratie et de dignité, elles finiront par fleurir. Les fissures dans le mur de l’austérité sont là, il ne résistera pas. »

Habermas dénonce le « châtiment » infligé aux Grecs. Dans le quotidien britannique The Guardian, le philosophe Jürgen Habermas, figure de l’École de Francfort, étrille la grande coalition allemande à l’attaque de la Grèce et du gouvernement Tsipras. « Je crains que le gouvernement allemand, incluant sa branche sociale-démocrate, n’ait dilapidé en l’espace d’une nuit tout le capital politique qu’une Allemagne meilleure avait accumulé depuis un demi-siècle », déplore le penseur, élève de Theodor Adorno et figure des révoltes étudiantes en Allemagne 
à la fin des années 1960. Et d’ajouter : « Forcer 
le gouvernement grec 
à donner son accord 
à un fonds de privatisation économiquement discutable et éminemment symbolique ne peut être compris que sous l’angle d’un châtiment décrété contre un gouvernement de gauche. »
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