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2 juillet 2017 7 02 /07 /juillet /2017 21:48
 
André Chassaigne (PCF) : "Je n'irai pas au congrès de Versailles pour écouter le monarque !"
André Chassaigne mercredi à l'Assemblée nationale. / AFP PHOTO / GEOFFROY VAN DER HASSELT © GEOFFROY VAN DER HASSELT
 
Le député PCF du Puy-de-Dôme, réélu avec 63,55 % face à un « marcheur », a retrouvé cette semaine sa présidence du groupe Gauche démocrate et républicaine. Il sera l’une des figures de l’opposition à l’Assemblée nationale. Interview.

Mercredi dernier, aux premiers jours de la reprise parlementaire, le communiste André Chassaigne a marqué les esprits. Alors que le débat en séance portait sur l’élection du bureau de l’Assemblée nationale, le président du groupe Gauche démocrate et républicaine a pris à partie Richard Ferrand et vigoureusement dénoncé les « petits traficotages » de La République en Marche.

La colère froide d'André Chassaigne à l'Assemblée nationale

En opposant déterminé, André Chassaigne, qui ne compte pas se laisser déborder par Jean-Luc Mélenchon, sera à Versailles lundi 3 juillet. « Je n’irai pas au congrès pour écouter le monarque Macron, prévient-il. J’irai à 14 heures pour manifester sur l’esplanade ! »

Macron s'adresse lundi au Congrès à Versailles

"Le congrès, c'est la matérialisation d'une présidentialisation extrême que le président de la République est en train de mettre en oeuvre", insiste le député auvergnat, dont il faut rappeler qu'il a été réélu le 18 juin dernier pour un quatrième mandat, en recueillant 63,55% face à un candidat de La République en Marche.Dimanche 18 juin, au soir, entouré de ses soutiens et fidèles, André Chassaigne vient tout juste d'apprendre sa réélection.
 

Vous portez toujours la cravate dans l'hémicycle ?...

Je porte toujours la cravate dans l'hémicycle. Un ancien député communiste disait que la classe ouvrière était très attentive à ce que ses représentants apparaissent sous leur meilleur jour. C'est une tradition et une question de respect par rapport au mandat que l'on porte. Pour autant, s'il y avait des oppositions sur la tenue vestimentaire, je ne m'y opposerai pas dans la mesure où les personnes qui rentrent dans l'hémicycle sont habillées correctement, dans le respect des citoyens de notre pays.

Votre opposition sera frontale face à la majorité ? Vous voterez contre la confiance au gouvernement ?

Nous nous sommes déclarés comme un groupe d'opposition. Les députés communistes, bien évidemment, ne voteront pas la confiance au gouvernement. Les députés d'Outre-Mer ont leur liberté de vote et je ne leur ai pas demandé quelle serait leur position.

Dans toutes les mesures régressives qui seront annoncées par le gouvernement et je pense en particulier à la loi travail, qui va être une loi El Khomri XXL, nous serons en opposition frontale, oui.

Maintenant, nous prenons nos décisions sur un texte de loi en fonction de son contenu. Dans toutes les mesures régressives qui seront annoncées par le gouvernement et je pense en particulier à la loi travail, qui va être une loi El Khomri XXL, nous serons en opposition frontale, oui. Nous considérons que ce sont des coups d'une extrême gravité qui vont être portés à la protection des salariés. Mais il est évident que pour des textes qui, pour nous, peuvent aller dans la bonne direction, nous interviendrons pour les améliorer, en donnant notre point de vue pour qu'ils soient les plus justes possibles.Aurelien Morissard / IP3. Paris, France le 27 juin 2017. Rassemblement intersyndical contre la reforme du Code du travail par ordonnances, devant les Invalides. En presence de Andre Chassaigne (G) et Philippe Poutou (D).

Concernant la loi de moralisation, nous avons déjà réfléchi et transmis des propositions au gouvernement pour l'améliorer. Par exemple, qu'on ne puisse pas voter un texte s'il n'y a pas plus de 20% des députés en séance, ou encore qu'il y ait un statut des collaborateurs de députés qui n'existe pas.

Peut-il y avoir des convergences entre votre groupe et celui des socialistes (31 députés), rebaptisé Nouvelle Gauche ?

C'est évident. Nous ne considérons pas qu'il y a deux groupes, celui des Insoumis et le nôtre, qui auraient le monopole de l'opposition de gauche au gouvernement. Les députés communistes travailleront à créer d'autres convergences y compris, nous l'espérons, avec des députés socialistes. C'est un de nos objectifs pour s'opposer à l'amplification de la dérive libérale.

Qu'attendez-vous du nouveau président de l'Assemblée nationale François de Rugy ?

Il a fait mardi un discours extrêmement ambiguë. Il a développé la nécessité qu'il y ait plus de citoyenneté, notamment avec les territoires, dans la construction de la loi, que les citoyens se réapproprient la politique. Ce que des députés comme moi ont déjà engagé dans leur circonscription. Ce qui m'inquiète dans sa déclaration, c'est qu'il a fait allusion à des blocages de fonctionnement de l'Assemblée nationale, et je sais qu'il y a un risque réel de limiter les droits des députés, notamment le droit d'amendement. Je serai très attentif à cela pour qu'il n'y ait pas de réduction des droits du Parlement. Nous ne voulons pas de dérive monarchique avec une hyper présidentialisation.

François de Rugy élu président d'une Assemblée nationale "profondément renouvelée"

Craignez vous une assemblée godillot qui empêche tout débat ?

Je le crains vraiment. Dans les premiers échanges que nous pouvons avoir avec des collègues députés, on fait le constat qu'il y a une volonté de la part des députés de la majorité de serrer les rangs. Ils vont laisser très peu de prises à l'opposition dans les discussions sur les projets de loi. On l'a déjà vu dans la répartition des postes au bureau de l'Assemblée nationale. Il y a une volonté de serrer les boulons, de laisser peu de place aux autres groupes et d'utiliser cette majorité comme un rouleau compresseur qui écraserait tout sur son passage et laisserait peu d'interstices pour qu'on puisse faire émerge des évolutions contradictoires.

Quel regard portez-vous sur les cinquante premiers jours du Président Emmanuel Macron ?

Il y a eu beaucoup d'annonces, et une contradiction, un décalage entre les propos qu'il a pu tenir avant et les prises de position aujourd'hui. Un exemple : il avait montré une opposition à l'état d'urgence en disant que cette mesure ne pouvait pas durer, qu'il fallait en sortir, que la loi permettait de répondre aux dangers du terrorisme. Aujourd'hui, il n'a plus ce discours et va même plus loin en laissant entendre que les mesures de l'état d'urgence pourraient entrer dans la loi.
De la même façon, il avait dit qu'il fallait donner plus de pouvoirs au Parlement, plus de pouvoirs à la représentation nationale. Aujourd'hui, ce qu'il met en oeuvre, c'est une présidentialisation accrue, une forme de monarchie républicaine quand, par exemple, il réunit le congrès pour développer son orientation politique. Ce n'est pas aller vers plus de démocratie parlementaire. C'est au contraire considérer que les pouvoirs doivent être entre les mains du président de la République.Elections législatives - Débat France Bleu La Montagne André Chassaigne vs Sébastien Gardette photo Fred Marquet 13/06/2017

Vous iriez jusqu'à parler de miroir aux alouettes ?

Oui, il y a une forme de miroir aux alouettes et d'illusion sur laquelle il continue à surfer. Mais je pense que très très rapidement, on va se rendre compte que si l'envolée est belle l'atterrissage sera beaucoup plus difficile !

Etre communiste, c'est vouloir faire du commun. Il faut avoir l'intelligence d'expliquer ce que c'est que d'être communiste

Le PCF veut se réformer, se "transformer", selon le secrétaire national Pierre Laurent. Dans quel but ? Juste continuer à exister ?

Qu'il puisse y avoir des évolutions du PCF, je n'y suis pas opposé. Toute organisation politique se doit d'évoluer. Mais la première chose que le Parti communiste devrait faire avant de mettre en oeuvre une forme de mutation, c'est d'abord être lui-même ! Qu'il arrête de se décider en fonction d'autres. Par nature, sa politique doit être une politique du rassemblement et ouverte sur la société, et non pas de repli sur soi. Si on est nous-mêmes dans notre façon d'être, dans notre pratique politique, dans notre ouverture aux autres, on retrouvera les fondamentaux de notre parti. Nous aurons alors déjà fait un grand chemin, avant toute illusion de transformation.

Pierre Laurent veut aussi ouvrir le débat sur le nom du parti. Certains n'assument plus ce terme "communiste" ?

Etre communiste, c'est vouloir faire du commun. Il faut avoir l'intelligence d'expliquer ce que c'est que d'être communiste. S'il faut changer de nom ? On me le dit souvent. Mais ce n'est pas la question du nom qui est important. Ce qui l'est, c'est ce qu'on met derrière ce nom, notre pratique, quelle démonstration on peut faire. Je ne sais pas si le sujet se posera. A priori, je ne suis pas fermé aux évolutions, mais l'essentiel n'est pas là. L'essentiel est dans le vécu de notre parti, dans l'image que l'on donne de notre parti.

Attention donc au marketing politique...

La mode, aujourd'hui, c'est de changer de sigle, de choisir un sigle en fonction de ce qui est porteur au niveau d'une communication souvent ponctuelle. Essayons plutôt de travailler dans la durée.

Avec dix autres députés PCF et cinq ultramarins divers gauche, André Chassaigne a réussi à sauver le groupe dela Gauche démocrate et républicaine à l'Assemblée nationale, qu'il préside. "L’élément nouveau, indique le député du Puy-de-Dôme, c’est que les députés PC sont passés de sept à onze. Dans ce groupe, la composante communiste aura son expression propre, avec une liberté de vote, puisque nous avons un accord technique avec les cinq députés d’Outre-Mer qui ont choisi de nous rejoindre. Nous allons pouvoir avoir une lisibilité dans notre expression. Cela ne signifie pas un repli sur soi, puisque la composante communiste du groupe envisage de travailler de concert avec celui de la France Insoumise".

Cédric Gourin

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