Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
6 mai 2016 5 06 /05 /mai /2016 10:04

En dépit du calme apparent du monde agricole pris par les travaux des champs en ce début de printemps, la conjoncture reste très difficile dans presque tous les secteurs de l’élevage, notamment en production porcine et de lait de vache où le revenu devrait encore baisser pendant plusieurs mois.

 

Les manifestations paysannes se sont estompées ces dernières semaines. Les travaux des champs y sont sans doute pour beaucoup. Il fallait terminer les semis de printemps à commencer par le maïs que les éleveurs sont plus nombreux à produire que les céréaliers dans la mesure où cette plante est devenue le principal fourrage dans les exploitations de bovins laitiers et allaitants, une fois broyée et conservée en silo. 

 

Il y eu récemment, quelques défilés de femmes d’agriculteurs coiffées d’un foulard noir pour tenter de sensibiliser l’opinion publique aux difficultés rencontrées par leurs conjoints alors qu’elles mêmes ramènent chaque mois un salaire de leur activité professionnelle à l’extérieur de l’exploitation. Dans bien des cas, cette paie ne sert plus seulement à faire vivre la famille paysanne mois après mois ; mais aussi à boucher les trous du déficit d’exploitation quand le prix du lait, de la viande ou du blé ne couvre plus les coûts de production. 

 

Car la situation des paysans ne s’est pas améliorée ces dernières semaines. D’une façon générale, on peut même dire qu’elle continue d’empirer. Le prix du porc tourne autour de 1,12€ le kilo de carcasse au marché de Plérin quand il faudrait 30 centimes de plus pour que les éleveurs gagnent leur vie. Pour les premier mois de l’année 2015, la baisse moyenne des cours a été de 3,5% pour la même période en 2015 alors que les prix étaient déjà trop bas. La tentative de mise en place d’un « fonds porcin » visant à dégager depuis le mois de mars une aide de 10 centimes par kilo que l’on ferait payer au consommateur final en l’impliquant en bas de facture de chaque maillon de la filière pour les viandes vendues en grande surface n’arrive pas à se mettre en place. Les abatteurs font de la résistance, craignant de voir augmenter les importations de viande porcine de Belgique, des Pays Bas, d‘Allemagne et d’ailleurs dès lors que la France serait seule à mettre en place cette fragile caisse de solidarité au cœur d’un marché européen totalement libéralisé. Ils s’appuient aussi sur le rapport de l’Observatoire de la formation des prix et des marges, publié récemment, pour rappeler que la marge nette de l’abattage-découpe a baissé de 33,3% pour passer dans le rouge en 2015 avec une perte nette moyenne de 1% sur chaque kilo de viande travaillé.

 

En production laitière, l’augmentation de l’offre suite à la sortie des quotas de production en avril 2015 continue de faire baisser le prix du lait depuis un an, voire plus. Et les choses ne sont pas près de s’arranger alors que l’embargo ferme une partie des débouchés qu’avaient le beurre et les fromages européens ces dernières années. Sur les deux premiers mois de 2016, la production laitière a augmenté de 7,4% en moyenne dans les pays de l’Union européenne. Mais, tandis que la production est plutôt stable en France, elle a augmenté de 35,6% en Irlande, de 20,6% en Belgique, de 18,5% aux Pays Bas, de 10,3% en Pologne et de 7,8% en Allemagne.

 

Cette surproduction est de nature à favoriser une baisse durable du pris du lait. En effet, quand la production globale de lait cru dépasse de quelques points la demande en produits laitiers transformés, les laiteries sont conduites à augmenter la production de denrées stockables que sont le beurre et la poudre de lait. Or plus de 40.000 tonnes de poudre de lait écrémé ont été stockées en Europe durant l’année 2015 tandis que 109.000 tonnes sont venues s’y ajouter entre janvier et mars 2016. Et ce n’est pas fini. Selon FranceAgrimer , « la mise à l’intervention va se poursuivre dans les mois à venir, avec l’ouverture d’un nouveau contingent d’achat à prix fixe (payé via des fonds avancés par l’Europe , ndlr) de 109.000 tonnes depuis le 20 avril».

 

Dès lors que les stocks de poudre et de beurre augmentent, leurs prix chutent rapidement et fortement sur les marchés à terme comme sur le marché physique au jour le jour. Du coup, les entreprises productrices de beurre et de poudre baissent de manière unilatérale le prix du lait payé aux paysans. Ainsi, les conditions se mettent en place pour que le litre de lait payé aux producteurs par la plupart des laiteries françaises soit cette année autour de 30 centimes, voire en dessous alors qu’il faut au moins 37 centimes pour tirer un revenu décent de son travail. Là encore , la tentative d’autorégulation de la production voulue par le ministre de l’Agriculture et la Fédération nationale des producteurs de lait de la FNSEA n’arrive pas à se mettre en place , les coopératives laitières étant les premières à refuser d’y entrer , de peur de perdre des parts de marché au profit des leurs concurrentes des pays qui augmentent leur production .

 

Ajoutons que l’augmentation du cheptel laitier européen depuis environ trois ans, en prévision de la sortie des quotas en avril 2015, a augmenté le nombre de vaches de réforme et de veaux mâles pour la boucherie. Ce qui fait aussi baisser le prix de la viande bovine. Ajoutons enfin que même le prix de la viande ovine est en baisse ces derniers mois bien que notre pays importe six agneaux quand il en consomme dix. Tout simplement parce que la baisse sensibles des tarifs douaniers sur les moutons de Nouvelle Zélande empêche les éleveurs français de gagner correctement leur vie depuis près de 40 ans.

 

Au regard des toutes ces difficultés, on pourrait penser que seul le départ en retraite est salvateur pour le monde paysan. Cela ne se vérifie pas à la lecture des chiffres fournis cette semaine par la Mutualité sociale agricole (MSA). Ils nous apprennent que les nouveaux retraités non salariés agricoles ont en moyenne 63 ans et deux mois quand ils perçoivent leur première pension. S’ils ont validé 150 trimestres, la pension annuelle s’élève à 9.209€ bruts. Pour les 50% de retraités agricoles qui n’ont pas de pension complémentaire, cela fait 766€ bruts par mois !

 

2016 est une année terrible pour les paysans
Partager cet article
Repost0

commentaires